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Archives historiques de l'Union européenne

De nouveaux dossiers de procédure de la CJUE désormais consultables

L’inventaire des dossiers de procédure originaux de la CJUE concernant l’année 1988 est désormais accessible dans la banque de données des Archives historiques de l’UE. Les dossiers sont exclusivement consultables dans leur version numérisée suivant les conditions d'accès spécifiées dans l’inventaire.

15 March 2024

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350 nouveaux dossiers provenant des archives de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) ont récemment été ouverts dans la banque de données des Archives historiques de l'Union européenne (AUE). Ces dossiers concernent 373 affaires pour lesquelles la CJUE a été saisie en 1988. Quatre arrêts particulièrement significatifs issus de ces dossiers sont résumés ci-dessous.

Le Parlement européen peut-il demander l'annulation d’actes du Conseil ou de la Commission ?

L’affaire 70/88 du Parlement européen contre le Conseil des Communautés européennes, dite « Tchernobyl », a eu une incidence sur les mécanismes d'équilibre institutionnel au sein des institutions européennes. Dans son arrêt, la Cour reconnait au Parlement la possibilité de requérir en annulation à l’encontre d’actes du Conseil ou de la Commission pour sauvegarder ses prérogatives.

L'affaire a été initiée par le Parlement suite à sa demande visant à annuler le règlement du Conseil n°3954/87 du 22 décembre 1987, fixant les niveaux maximaux admissibles de contamination radioactive pour les denrées alimentaires et les aliments pour animaux, vendus pour la consommation après un accident nucléaire ou dans toute autre situation d'urgence.

Le Conseil a adopté le règlement sur la base de l'article 31 du traité Euratom, bien que le Parlement ait recommandé son adoption sur la base de l'ex-article 100 A du traité CEE. Une base juridique dans le traité CEE aurait permis au Parlement d'exercer sa prérogative de participer à l'élaboration du règlement. Comme indiqué dans les motifs, le Parlement a contesté le règlement en déduisant que le « choix par le Conseil de la base juridique du règlement attaqué aurait conduit à une méconnaissance de ses prérogatives, en le privant de la possibilité, qu'offre la procédure de coopération, de participer de manière plus intense et plus active à l'élaboration de l'acte que dans le cadre d'une procédure de consultation »

Alors que le Conseil avait soulevé l’exception d’irrecevabilité au Parlement, la Cour, dans son arrêt, a rappelé que les voies de recours existantes ne permettaient pas de garantir que les actes adoptés par le Conseil ou la Commission en méconnaissance des prérogatives du Parlement fassent l'objet d'un contrôle approprié.

Garant de l'équilibre institutionnel prévu par les traités, la Cour a donc jugé que « le Parlement est recevable à saisir la Cour d'un recours en annulation dirigé contre un acte du Conseil ou de la Commission, à la condition que ce recours ne tende qu'à la sauvegarde de ses prérogatives et qu’il ne se fonde que sur des moyens tirés de la violation de celles-ci. Sous cette réserve, le recours en annulation du Parlement est soumis aux règles prévues par les traités pour le recours en annulation des autres institutions. »

Les particuliers peuvent-ils recourir aux normes communautaires au niveau local ? Un arrêt concernant les appels d'offres et l'effet direct pour les autorités administratives.

L'affaire Fratelli Costanzo S.p.A. contre Commune de Milan C-103/88 portait sur l'interprétation de l'article 29, paragraphe 5, de la Directive 71/305/CEE du Conseil relative aux marchés publics de travaux. La Cour a été saisie en vertu de l'article 177 du traité CEE par le tribunal administratif régional de Lombardie.

Dans le litige en question, la ville de Milan avait rejeté une offre présentée par la société Fratelli Costanzo Spa dans le cadre d'une procédure d'appel d'offres pour un marché public de travaux, en se fondant uniquement sur un critère mathématique. Cette exclusion était contraire à la directive 71/305/CEE du Conseil, qui exige une procédure d'examen détaillée et la possibilité pour les soumissionnaires de fournir des explications.

Dans son arrêt, la Cour a jugé que les États membres ne peuvent pas exclure automatiquement les offres sur la base d'un critère mathématique, mais qu'ils doivent suivre les dispositions de la directive et prévoir une procédure de « vérification des offres dès lors que celles-ci apparaissent comme anormalement basses, et non pas seulement lorsqu’elles sont manifestement anormalement basses », en donnant aux soumissionnaires la possibilité de fournir des explications sur ces offres. Elle a également précisé que les autorités administratives, même au niveau communal doivent également appliquer les dispositions de la directive et s'abstenir d'appliquer celles non conformes du droit national.

Les règlementations nationales restreignant l'ouverture des commerces le dimanche violent-elles l'article 30 du traité CEE relatif à la libre circulation des marchandises ?

L'affaire 145/88 Torfaen Borough Council contre B & Q plc fait partie de la saga « Sunday trading » examinées par la Cour. Dans cette affaire, la Cour a examiné si les restrictions nationales à l'ouverture dominicale des commerces pouvaient être contestées sur la base d'interprétations des articles 30 et 36 du traité CEE concernant la libre circulation des marchandises.

Dans cette affaire, le Torfaen Borough Council avait accusé B & Q Plc, magasins de vente d'outils de jardinage et de bricolage d'enfreindre le Shops Act 1950 du Royaume-Uni en restant ouvert le dimanche. Comme exposé dans les motifs de l’arrêt : «Devant la juridiction nationale, B & Q a soutenu que l'article 47 du Shops Act de 1950 était une mesure d'effet équivalant aux restrictions quantitatives à l'importation au sens de l' article 30 du traité CEE et que cette mesure n'était pas justifiée au titre de l'article 36 du traité CEE ni au titre d'aucune "exigence impérative ". »

Ayant constaté que l'interdiction d’ouverture le dimanche réduisait le total des ventes de B&Q, et parce qu’environ 10 % de ses marchandises provenaient d'autres États membres, la juridiction nationale a demandé à la CJUE de statuer à titre préjudiciel sur les questions suivantes :

(1) les restrictions nationales au commerce dominical constituent-elles des restrictions à l'importation au sens de l'article 30 du traité CEE et (2) dans l'affirmative, ces types de restrictions peuvent-ils bénéficier des exceptions à l'article 30 prévues par l'article 36 ou dans toute autre exception admise en droit communautaire ? Et (3) si les réponses aux questions (1) et/ou (2) pourraient-elles être influencées par quelque chose qui ferait de la mesure en cause représente un moyen de « discrimination arbitraire ou une restriction déguisée aux échanges entre les États membres ou qu'elle ne respecte pas le principe de proportionnalité ou est injustifiée à d'autres égards ? ».

Dans son arrêt, la Cour a précisé que les règlementations nationales n'entravent pas nécessairement la libre circulation des marchandises entre les États membres et qu'elles peuvent refléter des choix politiques et économiques faits par les États membres pour réglementer les heures de travail et de repos correspondant aux caractéristiques socioculturelles nationales, dont « l'appréciation appartient, […], aux États membres ». La CJUE a également statué que l’interdiction que l'article 30 prévoit ne s’appliquent pas aux règlementations nationales interdisant aux détaillants d'ouvrir le dimanche, à condition que l'effet restrictif sur la libre circulation des marchandises ne « dépassent pas les effets propres d’une réglementation de commerce ». Selon la Cour, il appartient aux juridictions nationales de déterminer si les effets restent dans ce cadre.

Les employeurs peuvent-ils pratiquer une discrimination fondée sur la grossesse et ses coûts anticipés pour l'entreprise ?

Dans l'affaire Dekker, affaire 177/88, la Cour suprême des Pays-Bas a posé des questions préjudicielles à la CJUE concernant l'interprétation des articles 2 et 3 de la directive 76/207/CEE du Conseil relative à l'égalité de traitement entre les femmes et les hommes en matière d'emploi.

Le litige entre Elisabeth Johanna Pacifica Dekker et Stichting Vormingscentrum voor Jong Volwassenen (VJV-Centrum) Plus concernait la discrimination fondée sur la grossesse. Mme Dekker avait posé sa candidature à un poste au sein de VJV-Centrum, en informant qu'elle était enceinte de trois mois.

Bien que la commission chargée du recrutement l'ait présentée à la direction du centre VJV comme la candidate la mieux qualifiée, Mme Dekker s’est vu refuser le poste. Dans la lettre qui lui a été adressée, le centre VJV avait allégué ne pas la retenir car elle était enceinte au moment de sa candidature, et que l’assureur du VJV ne rembourserait pas les indemnités journalières dues pendant le congé de maternité (considéré par l'assureur comme une « maladie prévisible »). Par conséquent le centre n'avait pas les moyens d'engager un remplaçant et subirait ainsi une perte d’effectifs.

La Cour a statué qu’«un employeur agit directement en violation du principe d'égalité de traitement énoncé aux articles 2, paragraphe 1, et 3, paragraphe 1, de la directive 76/207/CEE du Conseil, du 9 février 1976, relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail, s'il refuse de conclure un contrat de travail avec une candidate qu'il avait jugée apte à exercer l'activité concernée, lorsque ce refus d'engagement est fondé sur les conséquences possibles, dommageables pour l'employeur, de l'engagement d'une femme enceinte, et résultant des règles qui, édictées par les autorités publiques en matière d'incapacité de travail, assimilent l'empêchement d'exercer une activité pour cause de grossesse et d'accouchement à l'empêchement d'exercer une activité pour cause de maladie. »

Elle a également précisé que la décision susmentionnée s'appliquerait indépendamment du fait qu'il y ait ou non des candidats masculins pour le poste.

Enfin, en ce qui concerne la responsabilité du VJV-Centrum (l'employeur), la Cour a précisé que « si la directive 76/207 laisse aux États membres, pour sanctionner la violation de l'interdiction de discrimination, la liberté de choisir parmi les différentes solutions propres à réaliser son objet, elle implique toutefois que, lorsqu'un État membre choisit une sanction s'inscrivant dans un régime de responsabilité civile, toute violation de l'interdiction de discrimination suffise pour engager, à elle seule, la responsabilité entière de son auteur, sans qu'il puisse être tenu compte des causes d'exonération prévues par le droit national. »

Le fonds de la CJUE aux AHUE

Les chercheurs peuvent consulter les documents d'archives de la Cour de justice de l’UE selon les conditions d'accès spécifiées dans l’inventaire. L'inventaire du fonds de la CJUE est consultable ici.

Last update: 15 March 2024

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