Alors que la plupart des doctorants en sciences humaines rêvent de finaliser leur recherche dans un ouvrage scientifique, Anastasia Remes, docteure de l'IUE, avait une autre aspiration: créer une exposition accessible au grand public.
L'idée est née à la fois de sa conviction de longue date de la valeur de l'histoire publique, mais aussi suite à un échange avec l'université de New York (NYU) où Anastasia a appris à mettre en pratique les techniques des sciences humaines numériques. « Je voulais partager les résultats de mes recherches avec un public plus large que la communauté universitaire", a-t-elle déclaré.
Il en ressort une exposition interactive et immersive en réalité virtuelle qui emmène les visiteurs à la découverte du pavillon de la Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA) à l'exposition universelle de 1958 à Bruxelles. L'exposition peut être visionnée en ligne ou avec les casques de réalité virtuelle à la Maison Jean Monnet à Bazoches-sur-Guyonne (France). Elle a déjà accueilli plus de 11 000 visiteurs.
Une nouvelle forme de narration
La thèse de doctorat d'Anastasia, « Europe at the Expo : the pavilions of the European Community in universal exhibitions », traite de la quête de légitimité publique de la CECA, rendant l'Exposition universelle de 1958 à Bruxelles particulièrement intéressante à étudier. EXPO58 fut la première exposition universelle de l'après-guerre et la première occasion pour la CECA de se présenter et de faire connaître sa mission au grand public, sur la scène mondiale. À l'époque, les responsables de la CECA l'ont qualifiée de « plus grande entreprise de propagande à ce jour ».
Au cours de ses recherches dans les archives, Anastasia a découvert que de nombreux et intéressants documents concernant l'exposition de la CECA avaient été conservés. Des plans, des photographies, des interviews et d'autres sources de première main ont fourni des éléments audiovisuels pertinents pour ses travaux de thèse. La richesse de ces sources l’a incitée à chercher un support alternatif qui pourrait leur rendre « davantage justice » qu'un volume imprimé.
Ayant déjà mis au point un prototype d'exposition dans le cadre d'un séminaire sur les sciences humaines numériques à l'université de New York, Anastasia a pensé à [de] soumettre son projet à Dieter Schlenker, directeur des Archives historiques de l'Union européenne où sont conservées une grande partie de ses sources. « Puisque la plupart des sources sur la participation de la CECA à l'Expo 58 sont préservées aux AHUE et que ces dernières ont travaillé spécifiquement sur la valorisation de leurs archives audiovisuelles, j'ai pensé qu'elles pourraient être intéressées », explique-t-elle. Les AHUE ont accepté sa proposition et l’ont mis en contact avec la Maison de l’histoire européenne.
« Le processus d'élaboration de l'exposition a duré environ six mois, car la plupart des recherches préliminaires étaient achevées. Le gros du travail a consisté à transposer les résultats de ma thèse de doctorat sur un autre support et auprès d'un autre public ».
La modélisation 3D du projet a été réalisée par l'agence numérique MONOGRID, basée à Florence, qui a également développé le site web.
Pour l’instant disponible en allemand, anglais, et français, l’exposition sera traduite dans toutes les langues officielles de l'UE et intégrée à l'exposition permanente de la Maison de l'histoire européenne à Bruxelles, dont l'inauguration est prévue pour le début 2024. Les Archives historiques de l'Union européenne et la Maison de l'histoire européenne sont partenaires du projet.